Pas de vaccin à la maison

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La bureaucratie du système de santé empêche une septuagénaire de recevoir un vaccin antigrippal à la maison, alors qu’une infirmière du CLSC se rendait déjà chez elle pour immuniser son mari atteint d’Alzheimer. «Une aberration» que la femme, qui a des problèmes de mobilité, tenait à dénoncer.

Lise Guenette n’en croyait pas ses oreilles lorsqu’une employée du CLSC lui a expliqué qu’elle ne pourrait être vaccinée par l’infirmière à domicile mandatée pour vacciner son mari.

«Quand j’ai demandé si le système n’était pas illogique, on m’a répondu: “Oui, mais c’est comme ça que ça marche”», raconte la dame de 78 ans, qui agit comme aidante naturelle auprès de son mari.

Un vaccin à l’extérieur impliquerait beaucoup pour Mme Guenette, qui a elle-même des ennuis de santé. En plus de problèmes à un genou, elle vient tout juste d’être opérée pour un most cancers du sein, son troisième après les ovaires et un rein. Elle doit aussi se déplacer avec un déambulateur et n’a pas de voiture.

Et par-dessus tout, son mari ne peut rester seul à la maison selon les recommandations de son médecin. «Je devrai donc faire venir quelqu’un du CLSC pour veiller sur lui pendant les trois heures où je serai absente au lieu d’être vaccinée par une infirmière qui venait déjà à la maison? C’est illogique», soupire-t-elle, épuisée devant cette désorganisation.

Cafouillage

C’est tout ce cafouillage qui décourage Lise Guenette avec le temps. Cette histoire de vaccin est pour elle «la goutte qui a fait déborder le vase». «Ils ont beau nous appeler les aidants, on ne devient pas pour autant des marvel ladies», picture l’aidante, qui souligne que de tels illogismes vont à l’encontre du maintien à domicile que favorise le gouvernement.

Elle déplore un manque de communication entre les différents providers qui sont lourds à porter pour les bénéficiaires. «Il manque d’unité et d’harmonie dans ce système-là. On dirait que personne ne se parle. Ça fait qu’il faut se battre pour n’importe quoi», lance Mme Guenette.

Marche arrière

La path du CIUSSS de la Capitale-Nationale a qualifié de «vraiment dommage et déplorable» la state of affairs vécue par la septuagénaire.

«Il y a assurément eu une incompréhension de la directive. Nous ne vaccinons pas systématiquement le conjoint lors d’une visite à domicile, mais une analyse au cas par cas doit être faite. Mme Guenette est l’exemple parfait d’une personne qui remplit les critères et la state of affairs sera rétablie», a confirmé au Journal la porte-parole du CIUSS Catherine Chagnon.

Les proches aidants au Québec

  • 1,6 million de Québécois sont considérés comme des proches aidants
  • 58 % sont des femmes, 42 % sont des hommes
  • 12 % ont plus de 65 ans
  • 15 % y consacrent plus de 20 heures par semaine
  • 19 % considèrent que leur santé physique et émotionnelle s’est détériorée en un an

Sources: données de Statistique Canada (2012) et du Regroupement des aidants naturels du Québec (2014)

Une histoire «épouvantable»

«Il faut mieux supporter nos aidants», insiste Suzanne Girard, directrice de l’Affiliation des aidants naturels de la Capitale-Nationale, qui qualifie l’histoire de Lise Guenette «d’épouvantable».

Le gouvernement fait la promotion du maintien à domicile, mais est-ce que les moyens sont suffisants pour y arriver?

«Le maintien à domicile fait bel et bien partie des politiques du ministère de la Santé, mais les budgets ne suivent pas totalement cette course. Je dirais que le Québec est le dernier wagon du practice en termes d’investissement. Ce n’est pas avec quatre heures par semaine qu’on maintient des gens à domicile. C’est là qu’on épuise nos aidants. Pourtant, ils sont la construction portante du réseau de la santé en assurant au-delà de 90 % des soins à domicile auprès des malades. Et ça va continuer parce que les gens veulent vivre et mourir à domicile.»

Quelles sont les conséquences de ce manque à gagner dans le soutien aux aidants naturels?

«Ce qui arrive, en bout de ligne, c’est qu’actuellement 63 % des aidants décèdent avant les aidés dans les premières années. Est-ce qu’on peut travailler 24 heures par jour? Dormir quand on peut? Être complètement isolé? Comme les budgets ne suivent pas, ce sont les aidants qui portent ce fardeau et qui assument les conséquences de tout ça. Toute personne avec une santé fragilisée qui est aussi proche aidante augmente son risque de décès.»

Qu’est-ce que les gens qui vivent des conditions comme celle de Mme Guenette doivent faire?

«L’necessary est que l’aidant ait un lien avec quelqu’un, avec une ressource, comme notre affiliation ou d’autres organismes communautaires. Les gens ont peur de dénoncer. Ils ont peur de voir leurs providers réévalués ou diminués comme par hasard. On entend ça régulièrement, mais il existe des providers qui sont là pour leur venir en aide. Il faut que quelqu’un les aide à faire ces démarches dans un système que bien souvent, ils ne connaissent pas.»

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